« La
commission d’enquête parlementaire sur la sûreté et la sécurité des
installations pointe les risques d’une maintenance d’EDF sous-traitée à 80 %.
Et souligne le manque de formation professionnelle aux métiers du nucléaire.
Le chiffre a de
quoi interpeller : 80 % des travaux de maintenance réalisés par EDF sur ses 58
réacteurs nucléaires en France sont sous-traités. « Le recours à la
sous-traitance peut se justifier dans certains cas et n’est pas, en lui-même,
porteur de risques », note le rapport de la commission d’enquête parlementaire
sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires présenté jeudi par sa
rapporteure, Barbara Pompili (LREM). Mais « la perte de compétences des
exploitants sur les missions constamment déléguées à des opérateurs extérieures
a été clairement identifiée par la majorité des personnes entendues », alertent
les parlementaires, qui préconisent de « favoriser la réintégration des
compétences au sein des entreprises exploitantes afin de contenir le niveau
de sous-traitance et de ce fait, de mieux maîtriser la conduite des sites ». «
Le taux a toujours été de 80 %, il n’a pas varié, et la plupart des activités
sont confiées à ceux qui ont fabriqué les équipements : Framatome, Alstom et
maintenant GE, Schneider Electric… », a expliqué après la présentation du
rapport, Dominique Minière, le patron du parc nucléaire d’EDF. « Et la
réalisation des activités de maintenance n’est qu’une petite partie des
activités : il y a aussi la préparation des activités, la coordination,
l’ingénierie, l’exploitation, pour lesquels le taux de sous-traitance est bien
inférieur », a-t-il voulu recadrer.
La perte de
compétences dans les opérations de maintenance est identifiée depuis
plusieurs années. En novembre l’an dernier, Dominique Minière justifiait
des arrêts plus longs que d’ordinaire en raison des « difficultés de
compétences que nous constatons actuellement dans certaines équipes, notamment
dans les équipes des principaux fournisseurs ». En 2016, le PDG d’EDF,
Jean-Bernard Lévy, avait lui-même, lors d’une audition parlementaire, déploré
qu’on ne parle plus suffisamment français sur ses chantiers. « Il y a un
déficit évident dans l’enseignement professionnel, qui ne nous permet pas de
disposer de toute la main-d’œuvre qualifiée dont nous aurions besoin »,
expliquait-il. De quoi engendrer des erreurs de compréhension potentiellement
préjudiciables à la sûreté. EDF a d’ailleurs engagé un programme de
réinternalisation de certains postes clefs dans la robinetterie, le soudage et
la maintenance des diesels. « On réinternalise une petite partie de ces
activités pour mieux contrôler ceux qui les font », a expliqué Dominique
Minière jeudi.
Défaut de
surveillance après l’accident nucléaire de Fukushima, le niveau de
sous-traitance autorisé est passé de 7 à 3 : le titulaire d’un contrat d’EDF
peut ainsi faire appel à un sous-traitant qui fera lui-même appel à un
prestataire. Sans toutefois faire varier le taux de 80 %. Au-delà de la perte
de compétence, c’est sur le défaut de surveillance de ses prestataires
qu’a aussi été questionné EDF ces dernières années : au Creusot sur les
fabrications de l’ex-Areva (aujourd’hui Framatome), à Flamanville sur la
réalisation des soudures par un sous-traitant de l’ex-Areva, sans compter les
avaries techniques qui ont déjà coûté deux années de production à Paluel
(Seine-Maritime). « Ce recours massif à la sous-traitance entraîne une dilution
des responsabilités, notamment en matière de sûreté », pointe le rapport : «
chacun se sent moins impliqué qu’auparavant, certaines anomalies sont
constatées sans être reportées, la transmission informelle de l’information,
des usages, ne se fait plus ». Ces sous-traitants sont parfois eux-mêmes
fragilisés par EDF. Le groupe, pour limiter ses sorties de cash, a lissé et réduit
ses investissements dans le grand carénage, le programme de maintenance lourde
des réacteurs. Et certaines PME critiquent le parcours du combattant pour gérer
leur trésorerie. » (article tiré des Echos du 5/07/18)
Conclusion :
Cet article confirme bien
que dans toute entreprise les responsables maintenance doivent se poser un jour
ou l’autre, les questions suivantes au sujet de la sous-traitance de certaines
activités de leur secteur :
- Que
dois-je sous-traiter ?
- Que
dois-je absolument conserver et ne pas sous-traiter ?
- Comment
bien sous-traiter et quelles sont les règles de l’art en la matière ?
- Comment
bien définir mon besoin, pour avoir des coûts les mieux définis et les moins
élevés ?
- Comment obtenir
(et contrôler) la qualité du service demandé aux prestataires conformément au
contrat associé à un cahier des charges bien défini.
Voir ou relire notre
article « Maintenance sous-traitée : quoi, comment, les règles de l’art »
sur notre blog du Club des ingenieurs de maintenance. (rubrique « politique
maintenance »)
Bonne maintenance
Olivier