03/10/2019

Robotisation et automatisation chez Airbus



     Le futur a une adresse chez Airbus : hall 245, Hambourg. C’est là que l’avionneur européen a officiellement inauguré, mardi, sa nouvelle chaîne automatisée d’assemblage de fuselage d’A321 LR, dernier-né de sa famille des monocouloirs. 

Chaines de production robotisées

     Ce vaste hangar, au cœur du principal site industriel d’Airbus en Allemagne, rassemble pour la première fois tous les éléments d’une chaîne de production automatisée, avec sa logistique, son système de collecte de données numériques et ses robots. Une vingtaine au total, répartis sur trois lignes de production, capables d’effectuer, sous la surveillance d’un seul homme, des tâches nécessitant à 6 compagnons dans les autres sites du groupe.
     Comme dans l’industrie automobile où le processus en tôlerie est fortement automatisé et robotisé, ainsi que la logistique d’amenée et de présentation des pièces, sur des chaines capacitaires, Airbus a créé le même type de processus.
      Ici, tout a été pensé afin de limiter au minimum les interventions humaines. Dès leur arrivée sur le site, les volumineux panneaux et tronçons de fuselage sont automatiquement déchargés des camions par une grue automatisée pour être stockés, suspendus à des rails fixés au plafond, au niveau supérieur de l’usine. « Nous pouvons stocker jusqu’à 4 appareils », explique un responsable de la logistique, au milieu des tronçons de fuselage encore recouverts de leur couche de protection vert amande. Les éléments sont ensuite transférés par ces grues sur rails, vers les postes d’assemblage, où les attendent les robots de perçage, fraisage et rivetage. 

      Spécialement conçues pour les longues sections de l’A321LR, les nouvelles installations comprennent 20 robots, un nouveau concept logistique, un système de positionnement automatique par mesure laser et un système de collecte de données numérique. Ces dispositifs permettront d’accroître la qualité et l’efficacité, tout en renforçant la digitalisation du système de production industrielle d’Airbus.  
     Au niveau intermédiaire, 8 robots Flextrack se chargent de fixer la partie supérieure de la section de fuselage centrale sur les caissons latéraux. A raison de 2 perceuses riveteuses de chaque côté, positionnées par laser avec une précision de 0,2 millimètre, les Flextrack percent et installent 7.200 rivets. 6.000 rivets par section Après quoi les tronçons de fuselage poursuivent leur chemin jusqu’aux 3 lignes d’assemblage, où officient les robots Kuka, du nom de la firme allemande qui les fabriquent. Grâce à leur bras articulé, ils peuvent tourner autour des tronçons de fuselage et les fixer entre eux, à raison de 3.000 rivets par section. Là encore, aucune intervention humaine n’est requise, les robots étant même ravitaillés automatiquement par des tubes pneumatiques en rivets enduits et congelés (afin d’éviter la déformation). « Ce n’est pas beaucoup plus rapide que la même opération réalisée manuellement, mais le niveau de précision et de qualité est meilleur, explique un responsable d’atelier. Ces tâches répétitives sont non seulement pénibles physiquement, mais elles sont aussi source d’erreurs et de malfaçons. » Les jeunes compagnons acquiescent. « Percer et poser des rivets à la main est très fatigant pour les bras et les genoux. Et pendant que les robots percent, nous pouvons accomplir d’autres tâches ».

    Outre l’utilisation de robots, Airbus applique de nouvelles méthodes et technologies dans la logistique des matériaux et des pièces afin d’optimiser la production, d’améliorer l’ergonomie et de réduire les délais. Celles-ci incluent notamment la séparation de la logistique et des niveaux de production, le réapprovisionnement axé sur la demande et l’utilisation de véhicules autoguidés.

Pas de suppression d’emplois

     L’arrivée des robots n’a pas supprimé des emplois à Hambourg. Au contraire : l’augmentation des livraisons d’A320 a nécessité l’embauche d’un millier de personnes. « Les robots ne remplaceront pas les hommes, mais l’augmentation de la production de monocouloirs [portée de 57 à 60 par mois cette année et à 63, selon les prévisions, en 2021, NDLR] ne peut se faire sans davantage de robotisations », assure le nouveau directeur de la production d’Airbus, Michael Schoellhorn. L’enjeu du hall 245 va bien audelà. Pour Airbus, il s’agit d’apprendre à fabriquer, mais aussi à concevoir différemment ses futurs modèles. Les robots ne sont que la partie émergée de la révolution numérique en cours. Cette démarche globale va de la conception simultanée des nouveaux avions et de leur outil de production sur des plates-formes 3D à l’exploitation des données des avions pour optimiser leur exploitation et prévenir les pannes, en passant par la gestion de leur fabrication à l’échelle industrielle. De quoi générer, à terme, selon le PDG d’Airbus, Guillaume Faury, « environ 30 % d’économies sur la conception et un gain de temps de 25 % ». Mais aussi de quoi rester compétitif face à Boeing et leurs futurs concurrents. L’avionneur américain a pris de l’avance dans ce domaine. Les robots Kuka et Flextrack ont fait leur apparition dès 2014 sur la chaîne de fabrication des Boeing 777. Mais, pour l’heure, le hall 245 reste unique au sein du dispositif industriel d’Airbus. En effet, un tel investissement « à trois chiffres » ne se justifie que pour un nouveau modèle d’Airbus conçu à partir d’une maquette numérique et une nouvelle chaîne de production. Or, si la création d’une nouvelle chaîne d’assemblage d’A320 et d’A321 est bien « à l’étude », selon Guillaume Faury, son installation à Toulouse ou ailleurs n’est pas encore décidée. 


Retards de livraison et nouvelle chaine à Toulouse

     Si Airbus a mis les bouchées doubles à Hambourg pour moderniser et accélérer la production de ses monocouloirs, l’avionneur a pris un sérieux retard dans les livraisons de ses nouveaux bestsellers, l’A320neo et sa version rallongée, l’A321. Les nombreux tronçons de fuselage en attente d’assemblage à l’extérieur des hangars du site de Hambourg en témoignent. Certains A320 sont restés stockés si longtemps à Hambourg qu’il a fallu traité des problèmes de corrosion », assure un bon connaisseur du sujet.  « il nous est difficile de dire quand nous aurons totalement résorbé nos retards. » Dans une récente interview aux « Echos », le PDG d’Airbus, Guillaume Faury, estimait à deux ans la résolution complète des retards de production d’A321. « Sur la base de la situation actuelle, nous sommes dans cet ordre de grandeur pour mener à bien la transformation complète, a confirmé Michael Schoellhorn. « Mais cela pourrait prendre plus longtemps si la demande et la production continuent d’augmenter », a-t-il prévenu. « Un appareil complexe » Le principal point noir reste la production de l’A321 à long rayon d’action. L’avion bénéficie pourtant d’une chaîne d’assemblage de tronçons de fuselage dernier cri, entièrement automatisée.
      « Les problèmes rencontrés sur l’A321 n’ont pas de rapport avec le nouveau hangar 245, a affirmé le directeur de production. C’est l’addition de beaucoup de choses, pas toutes du fait d’Airbus. L’A321 est un appareil complexe et surtout, nous avons été victimes de notre succès, car nous n’avions pas prévu qu’il représenterait une part si importante des commandes. » Conçu comme un avion de niche, l’A321 représente aujourd’hui 50 % des commandes de monocouloirs d’Airbus. Cela a obligé l’avionneur à revoir ses plans de production et à étudier la création d’une seconde chaîne d’assemblage de l’A321, ailleurs qu’à Hambourg. Le site de Toulouse, où la chaîne de l’A380 livrera son dernier appareil en 2021, semble favori. Mais tout dépendra des conditions de compétitivité offertes sur place.

Plus d'info (et video)
https://www.airbus.com/newsroom/press-releases/fr/2019/10/airbus-inaugurates-new-a320-structure-assembly-line-in-hamburg.html#media-list-video-video-all_ml_0
Bonne maintenance
Olivier