17/01/2019

Batteries: visite de la Gigafactory de TESLA...




     C’est à 35 kilomètres de Reno, dans le Nevada, que bat le coeur du dispositif industriel de Tesla. Un bâtiment paré de légendes et de mystères. Bienvenue à la Gigafactory du constructeur de voitures électriques, la première du nom, qui se targue de produire aujourd’hui plus de batteries que tous les autres constructeurs automobiles réunis dans le monde. C’est la première fois depuis que sa production a démarré, il y a à peine deux ans, que Tesla ouvre ses portes à des médias européens.

     Ce qui frappe dès l’arrivée, c’est l’immensité. En forme de L géant, l’usine  occupe déjà près de 180.000 mètres carrés au sol − l’équivalent de 33 terrains de football. Et encore, elle n’atteint que 30 % de sa taille projetée : la maquette du hall d’accueil présente un gigantesque hexagone. « Comme les lignes s’étendent sur trois étages, elle occupera, à terme, 1,2 million de mètres carrés de surface utile de production et deviendra le plus grand bâtiment au monde », explique Chris Lister, directeur des opérations de l’usine. C’est ici que sont produits les batteries et les moteurs de la Model 3, le premier véhicule de série de la firme d’Elon Musk. Et c’est ici qu’une bonne partie des goulets d’étranglement survenus dès l’automne 2017 ont ralenti la montée en puissance de la production du véhicule. Au point que Tesla a raté ses objectifs à plusieurs reprises et frôlé la faillite au printemps. « Nous n’avons pas beaucoup dormi ces derniers mois », avoue en souriant le dirigeant.
      Aujourd’hui, les lignes tournent à plein régime, 24 heures sur 24. « Nous avons atteint le rythme de 10.000 packs batteries par semaine. Ça a été un immense challenge, assure- t-il. Et nous continuons à monter les cadences. » Objectif, assurer les livraisons de la Model 3 en Europe, qui doivent démarrer le mois prochain. En incluant les batteries stationnaires également produites ici (les fameuses Powerwall pour un usage résidentiel et Powerpack pour l’industrie), la production a atteint en juin dernier un rythme annualisé de 20 GWh – et les analystes estiment que l’objectif, à terme, d’un rythme de 35 GWh par an a déjà été atteint fin 2018. Pour y parvenir, il a fallu revoir l’organisation à certains endroits et revenir sur l’automatisation à outrance − alors que la Gigafactory devait être, selon la vision d’Elon Musk, « la machine qui fabrique la machine ». Le contraste est frappant. Sur certaines lignes, comme la fabrication des moteurs ou l’assemblage des bas de caisse (où sont intégrées les batteries), c’est un ballet de robots, immenses bras articulés pivotant et basculant en rythme, qui accueille le visiteur. Sans un humain, ou presque, en vue. Mais sur d’autres, les opérateurs sont omniprésents.
     L’assemblage des batteries en module, notamment, a été réorganisé. « Il y avait trop d’allers-retours entre différents postes, trop de passages par les élévateurs. Et certaines tâches, comme l’assemblage de câbles, sont plus adaptées à une manipulation humaine. Nous avons dû simplifier les process », explique Chris Listesine.
     Même si des lignes pointillées jaunes barrées d’un signe « AGV route » pullulent sur les sols des immenses couloirs, les AGV (pour « automated guided vehicles » , ces chariots automatisés qui prolifèrent dans les usines automobiles les plus modernes) semblent encore rares.

 Supply chain intégrée .

      Pour plus d’efficacité, Tesla a choisi d’accueillir sous son toit ses fournisseurs, au premier rang desquels Panasonic, qui produit les cellules des batteries lithium-ion − des petits tubes de 6,5 cm de long et de 1,8 cm de diamètre. « Mais il n’est pas le seul : il y a aussi d’autres partenaires, comme le français Valeo, qui fabrique des tubes de refroidissement pour les modules », indique Chris Lister. C’est un scoop, car Tesla interdit généralement à ses fournisseurs d’évoquer tout lien. « Cette intégration de la supply chain permet non seulement de réduire les coûts logistiques, mais aussi de résoudre les problèmes plus facilement », poursuit-il. Pour favoriser la communication, les bureaux fermés sont proscrits. Les personnes dédiées à l’administratif, à l’ingénierie ou au planning travaillent derrière des bureaux surélevés, au sein d’open spaces lumineux, cernés de baies vitrées. Mais ici, pas de salles de sport ou de détente comme sur les campus des « tech companies ». Orientée vers le nord pour favoriser les signaux GPS, l’usine est aussi censée fonctionner entièrement avec des énergies renouvelables – à l’aide de panneaux solaires sur le toit ou d’éoliennes. Pour le moment, seule une petite partie du toit est toutefois recouverte de panneaux, et Tesla reste connecté au réseau. Difficile de se battre sur tous les fronts.
     La Gigafactory vise à réduire le coût des batteries et à démocratiser la voiture électrique. Tesla prévoit d’en construire une douzaine sur la planète.

« MISSION Accelerating the world’s transition to sustainable energy » (MISSION Accélérer la transition vers une énergie durable dans le monde). Aucune ambiguïté dans le slogan, affiché en lettres capitales dans le lobby de la Gigafactory 1 de Tesla, dans le Nevada : l’objectif du constructeur de voitures électriques est de changer le monde. Une vision portée par son fantasque patron, Elon Musk, qui justifie à elle seule l’investissement de quelque 6 milliards de dollars consenti dans cette usine géante (dont 1,6 milliard apporté par Panasonic). Alors que la batterie représente une part importante de la valeur d’un véhicule électrique, il s’agit d’en réduire les coûts grâce à des volumes gigantesques, afin de rendre la voiture électrique abordable pour le plus grand nombre.
     La Gigafactory est l’arme de Tesla pour y parvenir. Ayant atteint fin 2018 un rythme annualisé de 250.000 packs de batteries par an pour la Model 3 (elle-même assemblée dans l’usine de Fremont, près de San José en Californie), elle revendique déjà une production supérieure à celle de tous les autres constructeurs de voitures électriques dans le monde.
     Le coût de production des cellules de batteries de Tesla s’établit à 116 dollars par kilowattheure, « bien inférieur à celui de l’industrie », estimé à 146 dollars en moyenne.

Les batteries de Tesla ont également un pouvoir énergétique supérieur à celles de la concurrence. Les analystes d’UBS, qui ont entièrement désossé l’été dernier une Model 3, ont conclu que son « pack batterie » était en avance sur tous les concurrents. Un rendement qui s’explique, lui, par l’équation chimique mise au point par Panasonic. « C’est notre potion magique secrète », avoue, dans les couloirs de la Gigafactory, Allan Swan, le patron de Panasonic Energy en Amérique du Nord. Tesla entend accroître les capacités de l’usine de Reno, pour absorber la croissance des ventes attendues de la Model 3 (les batteries des Model S et X sont importées du Japon), mais aussi y produire éventuellement ses futurs modèles. Elle n’atteint aujourd’hui que 30 % de sa taille ultime. Les experts spéculent déjà sur le choix de la Gigafactory 1 pour la Model Y, non seulement pour les batteries mais aussi pour l’assemblage. « C’est une option », reconnaît le patron de l’usine, Chris Lister. 

Douze Gigafactory  à venir :

     Mais la firme californienne compte aussi reproduire l’expérience, prévoyant de construire au total une douzaine de ces Gigafactory dans le monde. Il y a déjà une Gigafactory 2 aux Etats-Unis, à Buffalo dans l’état de New York, qui produit des panneaux et des tuiles solaires. Elon Musk vient tout juste de lancer la construction de la Gigafactory 3, près de Shanghai, en Chine, en prévision du lancement de la Model 3 dans le pays. Le démarrage de la production est prévu pour fin 2019. Enfin, le constructeur compte en construire une en Europe. La France est sur les rangs, mais la concurrence est rude, et il n’est pas  sûr que la crise des « gilets jaunes », vue de Californie, joue en faveur de l’Hexagone. Selon Elon Musk, il faudrait une centaine de Gigafactory pour que le monde puisse passer aux énergies renouvelables. —
     Grâce à la Gigafactory de Tesla, l’économie locale a retrouvé des couleurs. D’autres firmes technologiques comme Apple et Google sont venues s’installer dans la région de Reno.
Depuis que le constructeur de voitures électriques a décidé d’y installer sa première Gigafactory, les emplois fleurissent et les logements manquent dans le Nevada du Nord : plus de 34.500 postes ont été créés entre 2014 et 2017, dont 44 % directement liés à l’usine géante de Tesla. En 2018, l’impact de Tesla sur l’économie locale est estimé à près de 3,6 milliards de dollars, selon le même rapport.
     Selon la presse locale, faute de logements, certains nouveaux venus sont contraints de dormir dans leur voiture, sur des parkings. Tesla, qui fournit le transport à ses salariés depuis les différentes villes de l’Etat, réfléchit à leur proposer des logements abordables. La rançon du succès.
(Article tiré des Echos du 17/01/19)

Videos :
https://www.youtube.com/watch?v=G-7UpxXA-E0
https://youtu.be/TdUqQZC2dcE

Bonne maintenance
Olivier

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